Signer avec bébé : la "Langue des Signes Bébés "

Langage des signes avec bébé

La Langue des Signes Bébés (LSB) est un nouveau concept qui gagne à être connu, qui se développe de plus en plus dans les crèches notamment. Étant sensibilisée à la langue des signes française (LSF) lors de mes précédentes expériences, j’ai une première approche des signes usuels du quotidien. L’équipe de la micro-crèche étant intéressée par cette approche, nous avons creusé ce concept de LSB afin d’en dégager les bienfaits pour l’enfant et de pouvoir l’utiliser.
 

Comment est née la « Langue des Signes Bébés » (LSB) et s’est-elle développée ?


 
C’est aux États-Unis qu’elle a vu le jour, sous le nom de « baby signs » dans les années 1980. Il a été constaté à cette période, que les bébés vivant dans des familles sourdes utilisant la langue des signes communiquaient plus rapidement que les bébés de familles entendantes. A partir de là, des observations ont été réalisées et les bienfaits de la langue des signes ont été mis en lumière. Ces idées se sont étendues en France et prennent de plus en plus d’ampleur. Dans les années 2000, ce sont deux comédiennes sourdes et mères d’enfants entendant, qui se sont saisies de ce concept de LSB et qui l’ont véhiculé en France : Nathanaëlle Bouhier – Charles et Monica Companys. Des premiers livres ont fait leur apparition en 2006, et des associations commencent à se développer afin de faire connaitre la LSFB au plus grand nombre. Dans les établissements d’accueil de la petite enfance, les signes sont de plus en plus utilisés en accompagnement de la parole, sous forme de comptines, etc. Voyons de plus près en quoi consiste la LSB et quels sont ses atouts ?

Qu’est-ce que la LSB ? Quand l’utiliser ?


 
Ce sont des signes qui sont issus de la Langue des Signes Française (LSF) qu’utilisent les personnes sourdes et malentendantes. Ils sont néanmoins simplifiés car ils s’adressent aux bébés. Il ne s’agit pas d’utiliser la LSF dans toute sa complexité, mais de l’adapter aux plus petits, en utilisant des mots du quotidien. L’objectif est que les bébés puissent exprimer des choses (leurs besoins notamment, leurs sensations, etc) qu’ils ne peuvent faire lorsqu’ils n’ont pas encore les mots pour les formuler. Leur seul moyen d’expression à leur disposition est alors les pleurs. Pourquoi ne pas utiliser leur corps et notamment leurs mains, pour nous guider dans leurs besoins ? Il s’agit d’associer notre parole au signe correspondant (manger, boire, dormir…), afin que les bébés s’en saisissent et puissent le reproduire par la suite. Par la répétition de ces signes, les bébés peuvent les intégrer.

Nous pouvons nous demander : à quel moment utiliser ces signes ? Quand commencer ?

Eh bien, cela peut se faire dès la naissance du bébé. Même s’il n’est pas en capacité au départ de reproduire les signes, il les voit, il entend la parole associée et les enregistre dans sa mémoire. Ce n’est que plus tard que le bébé associe les mots aux gestes, à force de répétition. Peu à peu, vers 8-10 mois, l’enfant a la capacité motrice de reproduire des gestes simples, même s’ils ne sont pas reproduits à l’identique, il saura se faire comprendre. Plus les signes sont utilisés tôt, plus l’enfant s’en saisit et peut s’en servir de manière naturelle et spontanée.
Il est intéressant de savoir que les enfants maitrisent bien plus tôt et plus rapidement les muscles de leurs bras et de leurs mains que ceux de leur bouche. Par imitation ils peuvent rapidement se mettre à signer.

Pourquoi signer ? Quels intérêts ?

Utiliser la LSB n’est pas juste une « mode », cela a de réels bénéfices pour l’enfant et la relation adulte – enfant. Même si les signes s’estompent voire disparaissent lorsque l’enfant a les mots pour s’exprimer, signer avec bébé peut s’avérer utile, et dans tous les cas, est un « plus », qui enrichit la communication et les interactions.

Mieux comprendre l’enfant et répondre à ses besoins


 
Nous faisons déjà des gestes naturellement, comme par exemple lorsque nous disons au revoir. Le bébé, tôt, fait de même, spontanément, par imitation. Il associe le mouvement à la parole. Il s’agit de faire la même chose pour les gestes usuels. De cette manière, nous donnons à l’enfant la possibilité de s’exprimer et de se faire comprendre, avant de pouvoir parler. En effet, nous ne comprenons pas toujours bien les besoins des enfants, nous pensons parfois qu’il est fatigué alors qu’il a faim, nous ne détectons pas forcément quand il a soif, etc… Les signes permettent au bébé de pouvoir montrer ce qui peut les déranger, exprimer une émotion, sensation, et ce dont ils ont besoin. Cela peut éviter certaines frustrations liées à une réponse inadaptée. Une meilleure compréhension de l’enfant est donc le premier bénéfice de la LSB. Mais ce n’est pas le seul… un autre avantage est que cela renforce les interactions entre l’adulte et l’enfant…

Bénéfices dans la relation adulte – enfant

Le geste n’est jamais utilisé seul dans la communication avec le bébé, il est toujours accompagné de la parole, il enrichit alors l’interaction et la communication. Le fait de signer avec bébé, « oblige » en quelque sorte à capter son regard, à être face à lui lorsque nous lui parlons, afin qu’il puisse voir également le signe. Cette proximité lorsque nous communiquons avec bébé permet de renforcer les liens et de favoriser les échanges. Nous sommes ainsi dans un « face à face » qui renforce le lien.

Une ouverture sociétale sur le handicap

Par ailleurs, signer avec les enfants et leur transmettre quelques signes simples de manière ludique peut être bénéfique lorsque des enfants rencontrent des enfants atteints de surdité par exemple. Cela participe à mon sens à une ouverture sociétale, et nous permet d’expliquer à l’enfant qu’il existe des personnes qui n’entendent pas, et qui ne communiquent que de cette manière.
Après avoir travaillé dans une halte-garderie accueillant des enfants porteurs de handicap en même temps que des enfants « valides », j’ai observé des interactions entre enfants entendant et un enfant sourd non appareillé qui ne communiquait que par signes. Ces interactions étaient intéressantes et j’ai été surprise lorsque j’ai constaté que les enfants se sont saisi des signes que nous faisions avec cet enfant « différent ». Ils s’en sont appropriés certains, et, par imitation, communiquaient avec cet enfant sourd de cette manière. Toute la richesse est ici : de pouvoir ouvrir l’esprit de l’enfant à d’autres modes de communication, et lui transmettre des valeurs telles que l’acceptation de la « différence » et l’inclusion sociale. Car souvent, les enfants sourds restent ensemble, avec leur mode de communication propre. Pouvoir ouvrir ce cercle fermé en permettant aux « entendants » de faire un pas vers les personnes sourdes, c’est ouvrir des portes et rassembler les individus, quelques soient leurs différences.

Une des questions souvent soulevées est : la LSF ne retarde t’elle pas le langage oral de l’enfant ?

Aujourd’hui nous n’avons pas encore d’études montrant que les signes sont impactant de manière positive ou négative sur la parole. Ce qui ressort principalement des études menées jusqu’alors, c’est que cela favorise l’interaction adulte – enfant, et enrichit la communication entre eux. Ce qui est important c’est de toujours associer la parole au signe. Dans tous les cas, l’enfant tôt ou tard, parlera.

Projet LSB à la micro-crèche :


 
Pour le moment, nous en sommes au stade de projet, que nous allons démarrer au mois de décembre et développer au cours de l’année. Notre objectif est d’apprendre et d’utiliser quelques signes simples, associés aux mots du quotidien, en direction des enfants. Nous allons donc utiliser les signes de base lorsque nous communiquons avec l’enfant, notamment sur ses besoins. Mais de manière plus ludique, nous comptons utiliser des signes pour les comptines et pour quelques histoires, avec le support du kamishibaï.
En plus de pouvoir communiquer avec les bébés, la LSB nous permet d’apprendre des signes qui peuvent nous servir dans la vie de tous les jours, lorsque nous côtoyons des personnes atteintes de surdité. Notre projet étant d’ouvrir aux enfants porteurs de handicap, nous avons trouvé intéressant de nous mettre à signer des mots simples.
L’idée est bien sûr de transmettre aux familles ce que nous apprenons, et de les inclure dans ce projet pour celles qui le désirent. Pour ce faire, nous afficherons chaque semaine un nouveau signe, que nous mettrons en ligne par la suite sur le site internet, et nous pourrons vous les montrer également, et pourquoi pas, signer ensemble.
Aurélie, éducatrice de jeunes enfants
 
Bibliographie / internet :
– Journal des professionnels de la Petites Enfance, mai / juin 2014, n°88, p24 – 25
Signeavecmoi.com
Languedessignesbebe.com
Pour apprendre les signes :
« 115 signes du quotidien en crèche, a l’école ou à la maison », Sara Névoltris, éditions « un autre reg’art », mai 2014
« Dis-le avec tes mains », Monica Companys, éditions Monica Companys
 
 
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