LA DME (Diversification Menée par l’Enfant)

L’alimentation et la nutrition sont des sujets incontournables dans la vie de l’enfant, à la fois à la maison, et à la crèche. « Bien manger » est synonyme de bonne santé. Cela passe par ce qu’on propose aux enfants, la variété de ce qu’ils mangent, etc… la construction du goût et de l’ouverture aux nouvelles choses se fait dès la prime enfance, et commence dès que l’enfant commence à se nourrir autrement que par une alimentation lactée. C’est ce qu’on appelle l’étape de diversification alimentaire. Celle-ci est importante car c’est ici que se construisent à la fois les goûts, mais également le plaisir de manger, ainsi que les bonnes habitudes alimentaires. Il n’est pas rare de voir apparaître des troubles alimentaires chez l’adulte (obésité, goût prononcé pour le sucré, dégoût pour certains aliments, etc.) Nous avons également observé que trop d’enfants développent des blocages alimentaires qui peuvent mener à la maison, à des situations de conflit, de forçage. Tout cela peut s’éviter si l’enfant a développé de la curiosité, du plaisir et des bonnes habitudes alimentaires dès son plus jeune âge.

Ces constats nous ont amené à réfléchir à « comment introduire les aliments solides, de la manière la plus adaptée qui soit et qui respecte les besoins des enfants ? Comment faciliter l’appréhension des morceaux et l’éveil au gout  ? Nous nous questionnons sans cesse sur ce que nous proposons aux enfants lors des repas, comment nous les proposons, etc… nous tentons de travailler en cohérence avec les familles, et d’informer au maximum sur ce que nous savons de l’alimentation et l’équilibre alimentaire. Pas facile, sachant que les pédiatres ont certaines recommandations (ils ne sont même pas tous d’accords entre eux !), chaque famille a son point de vue, ses croyances, sa culture, et ses relations face aux aliments… notre démarche ici est de porter à connaissance une méthode de diversification alimentaire encore peu connue, qui diffère de la méthode classique par les purées. Nous avons eu la chance d’avoir un éclairage de cette méthode par une professionnelle qui est formée et compétente dans ce domaine, c’est pourquoi nous souhaitons transmettre ce que nous avons appris. Voici un éclairage sur ce qu’est la « Diversification Menée par l’Enfant » (DME).

Présentation rapide de la diversification menée par l’enfant (DME)

 

Différence avec diversification normale

Peut-être en avez-vous déjà entendu parler ? La diversification menée par l’enfant, plus connue sous le nom de DME est une autre manière de présenter les aliments à l’enfant, lorsqu’il passe de l’alimentation uniquement lactée aux fruits et légumes.

Couramment, il est proposé de passer du lait vers des fruits en compote et des légumes en purée, de manière progressive (dans les quantités et dans la variété de ce que l’on propose à l’enfant).  Puis viennent ensuite les aliments solides avec passage en morceaux. Nous avons constaté que parfois ce passage aux morceaux n’est pas évident, et que certains enfants, même les plus « grands  » à la micro-crèche, boudent certains aliments, ou sont réfractaires aux morceaux.

Dans la DME, il n’y a tout simplement pas de passage par la purée ! les morceaux sont introduits progressivement, mais pas de n’importe quelle manière. Les textures et la taille des aliments évoluent au rythme de l’apparition des dents, et de la capacité de l’enfant à les mâcher, et à les attraper… il s’agit d’une méthode avec différentes étapes à respecter. Mais l’idée est là. L’enfant appréhende les morceaux à texture molle dès le début, il gère ses quantités, il mange à sa faim, et il développe une certaine autonomie, car il n’y a pas besoin de la cuillère  : ses mains sont ses outils principaux au démarrage, et cela le responsabilise en quelque sorte et lui permet d’expérimenter l’aliment à sa manière.

Ce qu’il faut savoir, c’est que la DME nécessite une formation et une bonne connaissance des conditions, des règles de sécurité et de l’accompagnent de l’adulte. On ne se lance pas dans la DME sans en connaitre les principes. Elle demande également une cohérence entre ce qui se passe à la maison, à la crèche, chez les grands parents par exemple, etc.

Pour pouvoir utiliser cette méthode, il est nécessaire avant tout de chambouler nos esprits par rapport à ce que nous connaissons de la diversification alimentaire. Il faut pouvoir faire confiance à l’enfant, et être capable de lâcher prise, notamment sur les quantités. Car en DME, on ne pèse pas comme on pèse une purée. Les quantités sont difficiles à évaluer. C’est bébé qui gère et qui prend ce dont il a besoin.

La DME est encore peu connue, mais gagne à prendre de l’ampleur, car elle est une méthode qui colle au plus près des besoins de l’enfant, et qui a de nombreux avantages.

Quand commencer la DME ? Conditions préalables

 

Contrairement à la diversification classique conseillée par les pédiatres entre 5 et 6 mois, la DME ne démarre que plus tard car certaines conditions sont nécessaires au préalable.

A noter que l’enfant nous montre parfois qu’il a envie et est prêt à passer à autre chose que le lait… en étant attentif aux signaux, l’adulte peut se dire que c’est le « bon moment » de proposer autre chose. Notamment si les premières dent apparaissent : c’est un signal important qui montre que l’enfant est prêt à manger du « solide ». Si, en plus, il montre de l’intérêt pour ce que mange les adultes, c’est peut-être le moment de lui proposer de diversifier son alimentation.

Néanmoins, pour faire de la DME, il n’est pas indispensable que l’enfant ait des dents (certains enfants sortent des dents que tardivement). L’enfant « mâche » avec ses gencives.

Vers 6 mois, l’enfant a besoin de mordre davantage, de mastiquer, de mâcher. C’est la raison pour laquelle, plutôt que de commencer par des purées données à la cuillère il est possible de lui présenter de la nourriture solide coupée en morceaux aussi gros, voire plus gros que son propre poing. Certaines conditions sont néanmoins requises avant de commencer la DME…

Il doit être capable d ‘attraper des objets avec sa main

L’enfant s’intéresse aux objets, et il est capable d’en attraper un gros entre ses mains et le porter à sa bouche. Nous pouvons l’observer dans ses jeux. Une DME ne peut être commencée sans cette condition préalable. C’est en effet le principe même de la DME que l’enfant prenne les aliments de lui-même pour les porter à sa bouche !

Tenir assis

C’est une des raisons pour lesquelles on propose la DME vers 6 mois, quand l’enfant commence à tenir assis, bien calé dans sa chaise haute !  Cette condition-là peut porter à débat car elle va à l’encontre des principes de motricité libre, c’est-à-dire de ne pas mettre un enfant dans un position qu’il n’a pas acquise de lui-même. Nous vous disons sans cesse de ne pas asseoir un bébé qui ne sait pas le faire tout seul… néanmoins dans le cadre de la DME, cela peut s’entendre. Car l’enfant est bien calé, et ce moment ne dure pas longtemps. Cette « infraction » à la règle de la motricité libre peut donc être envisagée pendant ce temps de repas, à partir du moment où le reste du temps il n’est pas mis assis.

A noter : Que ce soit dans la diversification classique ou la DME, La position assise reste la meilleure position pour manger et faciliter la digestion.

Faire confiance et être prêt à « lâcher prise  » – prendre le temps

Il est nécessaire de faire confiance à l’enfant. À ses capacités de se « gérer » et de manger à sa faim. Car c’est difficile de quantifier dans cette approche on ne sait jamais trop ce que l’enfant a mangé exactement et combien  ! Au début de la DME, l’enfant est dans la découverte, il ne mangera peut-être pas dès le premier coup ce que l’adulte propose , ou le goutera mais cela ne constituera pas son repas entier. Pas de panique, s’il ne prend pas beaucoup au début, il suffit de compléter avec son lait habituel. L’enfant a besoin de temps pour découvrir, et c’est en répétant les propositions qu’il finit par se familiariser avec les aliments et les manger. Il s’agit donc au début de la DME de proposer le lait après avoir proposé les aliments solides (pour compléter son repas). L’enfant se régulera de lui-même et repoussera le biberon une fois qu’il aura assez mangé.

Si le « lâcher prise » sur les quantités prises par l’enfant est trop difficile pour les parents, il vaut mieux ne pas envisager la DME et commencer une diversification par les purées, car le temps du repas peut devenir un stress, et cela se transmet à l’enfant.

Autre détail… il y en aura un peu partout. L’enfant ne maitrise pas bien ses gestes, et il est en phase d’expérimentation. Il a besoin d’écraser le morceau, de le lâcher, etc. Dans la DME il est nécessaire de prévoir un petit temps de ménage après manger  !

Si ces conditions préalables sont remplies, il est alors possible de se lancer dans la DME, lorsque l’on sent que c’est le « bon moment ». Certains enfants n’investiront pas cette méthode, mais la majorité d’entre eux s’en saisissent et prennent un réel plaisir à ce moment.

A noter que l’accompagnement de l’adulte est indispensable. Comme pour toute nouvelle chose, l’enfant apprend par l’imitation. Si un légume est mis devant lui, il ne saura pas quoi en faire s’il n’a pas déjà vu faire… De ce fait, il est nécessaire de manger avec l’enfant (ou du moins « grignoter  » des bâtonnets de carottes par exemple…) au démarrage et les premières semaines.

Avantages de cette méthode

 

Autonomie – responsabilisation

Nos habitudes font que l’on utilise une cuillère pour donner à manger à l’enfant les purées. Il est alors dépendant de l’adulte et de cette cuillère. Avec la DME, il se servira de la cuillère plus tard. Au démarrage ce sont les mains qui font le travail, et qui attrapent les morceaux et les portent à la bouche. L’enfant est alors autonome de ce point de vue-là. Il va prendre en bouche, observer l’aliment, le tourner dans tous les sens, apprendre à mastiquer puis à avaler et enfin à digérer. Il se responsabilise plus tôt et le fait de se servir de ses mains le rend plus débrouillard et plus habile (il va manier en effet la préhension globale, puis de plus en plus fine, en évoluant dans la DME et en ayant des morceaux de plus en plus petits à attraper).

L’enfant est donc bien plus actif dans la DME que dans la diversification classique.

Respect de ses sensations de satiété

L’enfant se gère. Tant qu’il mange, il faut lui en redonner. Il s’arrêtera quand il n’en voudra plus. Lorsqu’on donne des purées dans la diversification classique, c’est l’adulte qui gère la quantité de ce qu’il y a dans l’assiette de l’enfant et ce qu’il mange. La cuillère incite l’enfant à manger, jusqu’à ce qu’il n’y en ai plus (on  « pousse » toujours que l’enfant à finir son assiette…). Parfois l’enfant n’a plus faim, mais ça on ne le remarque pas…

Développement du gout et de la curiosité

L’enfant découvre les goûts et les saveurs séparément, aliment par aliment.

Sa curiosité dès ses premiers mois fait qu’il sera surement plus ouvert en grandissant aux nouvelles choses, saveurs. En effet, lorsque le répertoire alimentaire a été ouvert étant bébé (au niveau des gouts et textures), que la curiosité et le plaisir ont été au rendez-vous, les enfants grandissent avec ça. Nous n’avons pas encore le recul nécessaire à la micro crèche pour affirmer tout cela, mais les observations faites dans d’autres lieux et les témoignages confirment que ces enfants ayant connu la DME mangent « mieux » et en fonction de leurs besoins.

C’est bon pour la mastication et développement des dents

Les enfants apprennent à mastiquer plus tôt (un nourrisson commence à mastiquer à 6 mois).

La DME favorise également la sortie des dents (au fil des dents qui sortent, les textures des morceaux évoluent). C’est également excellent pour le développement de la mâchoire.

L’appréhension précoce des morceaux favorise en plus un meilleur développement de son palais, en largeur et en profondeur.

Convivialité et plaisir de manger

Au démarrage de la DME, il est nécessaire de manger avec l’enfant, ce qui peut représenter un inconvénient, par rapport à l’horaire. Mais d’un autre côté, cela permet un moment de partage et de convivialité. Souvent l’enfant prend plaisir à ces découvertes et nouvelles expériences alimentaires. Cela devient un réel moment de plaisir, plaisir de l’adulte de voir l’enfant se débrouiller, être curieux de manger comme ses parents, etc…

Règles de sécurité – une cohésion et un accompagnement nécessaire

 

Si la DME est « mal faite  », il y a des risques d’étouffement pour l’enfant… alors, pour que la DME se déroule en toute sécurité, il y a des règles à respecter  :

  • Rester toujours à côté de lui afin de veiller à ce qu’il ne s’étouffe pas
  • Observer comment il « gère »  : sans être dans un stress, qui va stresser l’enfant et le mettre en danger… il ne s’agit pas d’être à l’affut de l’accident mais être présent et disponible et en observation
  • Créer une ambiance calme et détendue
  • Ne pas lui mettre un aliment dans sa bouche : le laisser faire
  • Ne pas le faire boire de l’eau tant qu’il a un aliment dans la bouche
  • Créer une cohérence entre la maison, le lieu d’accueil (nounou, crèche.) et la famille (si gardé par les grands parents, etc…)
  • Faire à son rythme et prendre le temps
  • Bien respecter les étapes de la DME (au niveau des textures et de la taille des aliments)

Ou se former  ?

Comme dit précédemment, il ne faut pas faire n’importe quoi avec la DME… si cette méthode n’est pas « bien faite  », elle n’a pas de sens, et risque d’être dangereuse. Ainsi, il est nécessaire d’y être formé. Différentes étapes sont en effet à respecter (au niveau du choix des aliments, des textures, de la taille, etc.).

L’idée de cet article est de susciter la curiosité, et de créer de l’échange avec les professionnelles. Si vous êtes intéressés, nous pourrons vous orienter vers notre partenaire, le réseau « Hamstouille », afin de bénéficier de formation, dans l’optique d’une mise en place à la maison et la crèche. Sans cela, ne vous y lancez pas à l’aveugle !

 

Néanmoins, à la crèche, en accord avec les familles, nous proposons un « mix  » entre la diversification classique par les purées, et une approche des morceaux inspirée de la DME. Des gros morceaux fondants sont en effet proposés à l’enfant en même temps que la purée, dans l’optique que l’enfant appréhende tôt et de manière progressive les morceaux. Ainsi, quand l’enfant y porte un grand intérêt et commence à bouder les purées, nous pouvons passer exclusivement aux morceaux  !

Nous l’avons testé depuis quelques mois, avec un enfant, et nous avons observé un réel plaisir de manger et un passage sans difficultés aux morceaux. La curiosité de cet enfant envers les morceaux et les nouveaux aliments nous confirme les bienfaits de cette démarche  !

Pour aller plus loin…

Réseau Hamstouille pour plus d’informations : https://www.hamstouille.fr/

La DME expliquée en images  : https://bougribouillons.fr/dme-diversification-menee-par-lenfant/

Quelques sites parlant de la DME, pour avoir plus d’infos  :

https://lesprosdelapetiteenfance.fr/bebes-enfants/nutrition/la-diversification-alimentaire/la-diversification-menee-par-lenfant-dme-une-petite-revolution-dans-lalimentation

https://byebyepurees.com/je-choisis-la-dme/

https://www.oummi-materne.com/tout-savoir-sur-la-dme-diversification-menee-par-lenfant/

http://www.pediatre-online.fr/alimentation/diversification-alimentaire-menee-lenfant-dme-quest-cest/

https://www.lllfrance.org/1705-diversification-alimentaire-menee-par-l-enfant-temoignages

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